L’Ile-Rousse
OLMI-CAPPELLA ET SPELUNCATU
Sant’Antone Abbate festighjatu da e duie late di a Bocca
PIERRE RIDOLFI
Corse-Matin du 18 janvier 2021
La statue de Sant Antone Abbate a été portée en procession sur la place de Speluncatu où le père Jean a procédé lui aussi à la bénédiction des quatre points cardinaux.
La confrérie San Parteu représentant la pieve du Ghjunsani et la confrérie Sant’Antone Abbate de Speluncatu ont fêté leur saint patron ce week-end.
Les festivités dominicales ont débuté vendredi par la confection des petits pains de la Saint-Antoine dans les deux villages. « Autrefois, les confrères allaient de maison en maison recueillir la farine nécessaire à la confection des petits pains, raconte Santu Massiani, confrère du Ghjunsani faisant partie des membres fondateurs de la compagnie montagneuse. Ils constituaient une équipe pour les préparer dans un four d’Olmi-Cappella, puis les petits pains étaient bénis lors de la célébration et ils les restituaient alors aux familles. » Moment fédérateur chargé en tradition et en échanges, la confection des petits pains porte-bonheur protégeant des intempéries, des maladies et des adversités se veut être un lien inter-générationnel des deux côtés de la Bocca à a Battaglia, malgré les restrictions sanitaires en vigueur.
Sauvegarder une tradition séculaire
Dans le sillage du Riacquistu, il a été décidé de fédérer en 1995 les anciennes confréries de la pieve autour d’une seule, ayant pour saint patron San Parteu, montagne éponyme et point géographique de ralliement de la haute vallée. « Chaque village avait sa confrérie, explique Patrick Colombani, premier prieur de la Confrérie du Ghjunsani. Il y avait saint Jean à Mausoleu, saint Antoine Abbé à Olmi-Cappella, saint Pancrace et sainte Croix à Pioggiula, et saint Jacques le Majeur à Vallica. »
Les Speloncatais ont su suivre l’exemple de leurs voisins et, avec leur aide, sortir la confrérie Sant’Antone Abbate de son sommeil en 2001.
Samedi soir, les confrères du village se sont réunis dans l’église Santa Catalina et ont récité l’office désignant le prieur et le second prieur, personnes qui vont présider la confrérie durant l’année à venir. Jean-Dominique Poli, prieur de l’année passée, explique que cet office est fidèle au règlement de la confrérie datant de 1632. Ainsi, la veille de leur fête patronale, les noms des confrères sont mis dans une boîte et les officiers sont tirés au sort. Le premier nom sortant sera désigné prieur, ensuite vient le second prieur, puis les autres postes. « Bien sûr, chacun peut refuser ! », souligne l’ancien prieur speloncatais. Ainsi, après la messe en mémoire des confrères défunts, Barthélémy Savelli et Anthony Olhagaray sont nommés respectivement prieur et second prieur jusqu’à l’année prochaine.
Dynamiser le rural
La vie de ces confréries du rural rythme véritablement les festivités de leurs villages. Outre les fêtes patronales et les offices particuliers, ces compagnies religieuses sont des acteurs importants de la Semaine Sainte et des veillées de Noël, garants des coutumes séculaires et des traditions orales, mais surtout de l’entraide et du lien social.
« À Speluncatu ou dans le Ghjunsani, nous chantons la messe et les offices en polyphonie mais avec nos ‘versi’, mélodies chantées propres à nos villages, explique un confrère de Speluncatu, Raphaël Quilici. Ce savoir nous vient soit de la tradition orale, soit d’enregistrements. C’est notre devoir de le transmettre aux générations suivantes. »
Cette fin de semaine riche pour les confréries des deux versants du col s’est terminée hier à 11 heures, à Speluncatu, avec la messe en l’honneur de leur saint patron, célébré dans l’église Santa Catalina par le père Jean, tandis que dans le Ghjunsani, la messe de saint Antoine Abbé a été célébrée dans la confrérie éponyme à Olmi-Cappella par l’abbé Squarcioni à 15 heures.
Les confrères et les habitants du Ghjunsani ont préparé les petits pains vendredi dans l’atelier de la biscuiterie Casanova. DOC. CM
« Meme » Savelli, le nouveau prieur de la Confrérie de Speluncatu, en pleine préparation des « pannioli », sous le regard attentif de son petit-fils Louis, jeune confrère. DOC. CM
À la fin de la messe, les ghjunsaninchi ont porté leur saint en procession, et l’abbé Squarcioni a procédé à la bénédiction des quatre points cardinaux.
À Speluncatu comme dans le Ghjunsani les polyphonies sacrées sont chantées avec les versi propres à leurs villages.
À la fin de la célébration, les confrères du Ghjunsani ont distribué les petits pains bénis à la population.
PHOTOS PIERRE RIDOLFI